Jean-Lucien Guillaume : Bruxellois non peut-être

JEAN-LUCIEN GUILLAUME

Bruxellois non peut-être
1999
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Variable
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Jean-Lucien Guillaume, Bruxellois non peut-être

"L'art n'est pas un remède mais peut améliorer le quotidien"

BOKHORST,HERMINE
Page 19
Lundi 27 décembre 1999

Jean-Lucien Guillaume...Bruxellois non peut-être

Tous ne sont pas nés à Bruxelles, mais chacun y a pris racine. Qui sont-ils? D'où leur vient cette passion de la ville? Dans les reflets de ces portraits de Bruxelloi(se)s, nous vous invitons à découvrir les faces cachées de la capitale de l'Europe. Aujourd'hui, Jean-Lucien Guillaume, artiste conceptuel français qui a choisi de s'établir à Bruxelles, lieu de rencontre du monde germanique et latin après avoir «eu pas mal la bougeotte», de Chicago à Berlin.

«L'art n'est pas un remède mais peut améliorer le quotidien»

Jean-Lucien Guillaume, artiste conceptuel, sculpte les mots et écrit des partitions de couleurs.

Il a finalement posé ses paquets. Dans le quartier Anneessens, pas vraiment le coin le plus attirant de la capitale.
Ce quartier était en train de revivre, dit Jean-Lucien Guillaume, 40 ans. Avant, la place Fontainas ressemblait à Beyrouth. Puis Saint-Jacques et Saint-Géry se sont tout à coup transformés (...) Avant je vivais à Saint-Gilles. Je suis arrivé à Bruxelles en 1996, l'année blanche. 

(...) Pour lui, Bruxelles ressemble à Manhattan par son côté cosmopolite. Il aime également le fait qu'elle soit un carrefour entre la culture latine et germanique, le coeur de l'Europe (...) D'aucuns affirment que mon quartier est le petit Chicago, mais on voit bien que ceux qui le disent n'ont jamais vécu dans le vrai Chicago. 

Jean-Lucien Guillaume est un artiste qui se décrit comme conceptuel et qui déclare aimer travailler sous certaines contraintes, imposées de l'extérieur ou par lui-même.

Le comité de quartier des habitants d'Anneessens, regroupés dans le «buurtwinkel» sont venus me trouver pour réaliser une fresque rue du Vautour dans le cadre d'un projet artistique à dimension sociale de la Fondation Roi Baudouin.
Cette fresque décore aujourd'hui sur 70 m 2 une grande porte à l'arrière des ateliers de la Stib. Il s'agit d'une grande mosaïque de couleurs composée de 896 carrés.

Il faut savoir que la rue du Vautour n'est pas l'avenue Louise, nous ne nous trouvons pas dans une situation de type muséographique. L'art public ne doit pas être confiné à des spécialistes, elle doit pouvoir parler à tous. Il faut aussi que l'oeuvre fasse sens, il s'agit de trouver un appui. J'ai donc examiné la structure de la population du quartier et j'ai constaté qu'elle comportait beaucoup de jeunes. J'ai travaillé sur les tranches d'âge en attribuant à chacune une couleur. Jaune pour les 0 à 5 ans, rouge pour les 5 à 10 ans jusqu'à gris pour les plus de 60 ans. Ce qui m'a donné les pourcentages de chaque couleur. D'après ces statistiques multicolores, le quartier est constitué de 44% de moins de 20 ans. Ce qui a donné une touche très vive dans l'arc-en-ciel des âges.

Jean-Lucien Guillaume a donc imaginé une palette pour disposer ces carrés colorés. Ce sont les habitants eux-mêmes qui ont appliqué la couleur. La partie supérieure a été réalisée par des personnes du «jobwinkel», une association d'insersion professionnelle. Les kets du coin y ont mis leur touche. Certains n'avaient pas cinq ans. Et Dario, le vieux cordonnier de la rue des Vierges, a peint aussi son carré. C'était très chouette et très riche dans la dimension des contacts humains.

Il est important d'apporter de la lumière et des couleurs dans le quartier.La couleur, c'est la vie. Quelqu'un qui vit dans une poubelle ne respecte pas son environnement. La première phase du projet est terminée et je suis en train de discuter avec la Ville pour pouvoir peindre le mur en face et les bornes aux couleurs de l'arc-en-ciel ainsi que l'auvent en argenté. Je voudrais aussi éclairer le bâtiment de l'intérieur. Afin de réaliser un ensemble (...)

Il a ainsi inventé un alphabet combinatoire composé de carrés, triangles et quarts de cercles qu'il appelle «Modulart»avec lequel il écrit des mots qu'il assemble en sculptures en superposant les formes découpées.
C'est très pictural et abstrait. C'est sans doute cette obsession de la géométrie de créer des formes qui en génèrent d'autres.

HERMINE BOKHORST